Affiliation:
1. Professeure, Département des sciences juridiques, Université du Québec à Montréal1
Abstract
Une étude empirique de vingt décisions (2004-2020) rendues par le Tribunal administratif du travail (TAT) du Québec en matière de harcèlement psychologique à caractère raciste révèle que plusieurs conditions du recours pour harcèlement psychologique ont conduit au rejet d’une plainte pour harcèlement raciste, alors qu’il est clair que la situation constituait une violation de la Charte des droits et libertés de la personne. Dans de tels cas, le recours à une plainte pour harcèlement psychologique aux termes de la Loi sur les normes du travail (LNT) sert d’éteignoir aux droits fondamentaux des victimes de harcèlement raciste au travail. L’auteure conclut qu’il est urgent de rouvrir un accès au Tribunal des droits de la personne du Québec pour les personnes non syndiquées victimes de harcèlement raciste au travail. Cependant, celui-ci ne doit pas non plus être l’unique forum où il est possible pour les personnes racisées de dénoncer les violations de leurs droits fondamentaux. Une interprétation téléologique des dispositions actuelles de la LNT permettrait aux juges du TAT de tenir compte davantage de la situation précaire des personnes racisées dans les milieux de travail non syndiqués au Québec, et notamment des obstacles importants à la dénonciation contemporaine à l’employeur de conduites racistes ainsi que des effets préjudiciables sur les personnes racisées de telles conduites. De plus, le législateur doit intervenir pour rappeler les spécificités du harcèlement à caractère raciste au sein du régime de la LNT, comme il l’a fait en 2018 pour le harcèlement à caractère sexuel.