Author:
Bloy Géraldine,Rigal Laurent
Abstract
L’article propose une réflexion sur les usages cliniques et éthiques possibles de la floraison de travaux de sciences sociales sur les inégalités sociales de santé en France, qui soulignent de plus en plus la contribution des soins à ces dernières. Un bilan des enquêtes récentes révèle que les façons de dispenser les soins et d’interagir avec les patients peuvent être la fois marquées par une méconnaissance du social et chargées de stéréotypes. Nos propres travaux ont contribué à mettre en évidence une tendance à un profilage social des pratiques préventives, en médecine générale en l’occurrence. Nous revenons sur les formes d’interpellation éthico-politique des professionnels portées par la sociologie de la santé française et engageons une réflexion en termes d’injonction contradictoire inhérente au soin. La démonstration d’une production endogène d’inégalités sociales de santé complexifie, par une sorte d’injonction sociale, la tension éthique classique entre universalisme et personnalisation des soins. Une juste adaptation des pratiques soignantes consisterait-elle alors à prendre en compte les rapports sociaux inégaux tout en essayant d’en désamorcer la portée ? Quelle est et quelle pourrait être la contribution des travaux de sociologie de la santé à ce programme ? Nous proposons quelques repères pour une éthique socialement informée, mobilisant les sciences sociales tout en prenant appui sur la réflexivité des cliniciens, pour tenter de rendre moins dommageable le paradoxe du soin égalitaire dans une société inégalitaire.