Abstract
Au nom d’une conception inclusive, qui vise à décentrer le regard des classifications stigmatisantes, l’activité artistique auprès d’enfants dits handicapés mentaux a largement été mise en avant. Elle donnerait l’occasion de stimuler des potentialités insoupçonnées, car elle respecterait la singularité de chacun en s’attachant à libérer leur « créativité » plutôt que de conformer des individus à partir d’un programme conçu pour les êtres « moyens ». Seulement la notion de « créativité », sous-tendue par l’idéal normatif de l’autonomie, nous invite à interroger sa traduction pratique face à des enfants précisément placés en IME pour leur « manque » d’autonomie. À partir d’une étude ethnographique, l’article rappelle la diversité des perceptions attenantes à la pratique artistique, et montre qu’elle n’est pas centrée « naturellement » sur le développement « créatif » de l’enfant. En soulignant les dimensions normatives divergentes engagées par les dispositifs pédagogiques que nous prenons soin de décrire, nous analyserons les difficultés et les paradoxes qu’ils soulèvent. Si la question du « niveau » ne disparaît jamais totalement, indépendamment des « choix » pédagogiques réalisés, c’est aussi parce que l’appel à la créativité de l’enfant lui intime implicitement de mobiliser certaines compétences, et d’exprimer sa singularité dans le sens voulu par l’activité.
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