Abstract
Les États-Unis peuvent représenter, en matière automobile, les deux faces de la financiarisation envisagée dans sa relation de concurrence-complémentarité par rapport aux dynamiques industrielles, d’emploi et d’innovation. En effet, le management focalisé sur la valeur pour l’actionnaire, qui s’est imposé dans les Big 3 devenues les Big 2, a été ‒ pour de bonnes raisons ‒ incriminé pour expliquer les catastrophes intervenues en 2009-2010 (Sauviat, 2009), dont la construction automobile américaine n’est sortie que par une intervention massive de l’État 1 (Jullien et Lung, 2011). D’un autre côté, Tesla semble avoir bénéficié – et l’industrie automobile américaine avec elle – de l’efficience des marchés de valeurs technologiques pour instaurer un modèle innovant et imposer ‒ sans que l’État n’ait eu à intervenir ‒ un scénario souhaitable de destruction créatrice (Mougenot, 2015). Les marchés ont, effectivement, longtemps accepté que Tesla perde beaucoup d’argent et, par là même, dispose du temps requis pour que technologiquement, industriellement et commercialement, l’entreprise puisse atteindre la maturité nécessaire et, in fine , la profitabilité. Pourtant, après avoir vécu trois années profitables ‒ de 2020 à 2022 ‒ sur un petit marché mondial du véhicule électrique en forte croissance qu’il dominait en vendant des véhicules très chers, Tesla est confronté à la question de sa banalisation. En effet, le marché du VE n’est plus infinitésimal et est appelé à devenir le cœur du marché de l’automobile. Dans ce contexte, le marché devenant un marché de masse, les avantages du pionnier s’étiolent et l’intensité de la concurrence croît. En baissant drastiquement ses prix, Tesla précipite cette mutation pour laquelle il n’est pas sûr qu’il soit le mieux armé. Les marchés financiers pourraient ainsi s’être trompés.
Reference14 articles.
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