Abstract
Une partie importante de l’anthropologie dite anarchiste tente de trouver dans l’histoire humaine des exemples de « société libertaire », vivant une relative harmonie communautaire associant indépendance collective, autonomie individuelle, égalité socio-économique et solidarité collective. Il existe pourtant un « paradoxe de Clastres » : l’unité apparemment consensuelle du groupe et l’égale liberté de chacun des membres au plan politique s’articulent à une double asymétrie constitutive au plan culturel : d’une part, à l’intérieur de la société en termes de prestige, de talent, d’influence ou de genre ; d’autre part, en rapport à une Loi ancestrale, présentée comme éternelle et indéfectible, agissant au titre de normativité hétéronome. De cette double hiérarchie enchevêtrée, il convient de tirer un enseignement clair : aucune société humaine, y compris la plus égalitaire, ne saurait exister en l’absence d’un Tiers fondateur, qui agit à titre de légitimation culturelle et d’orientation socio-politique.
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