Abstract
Organisées au printemps 1971 pour dénoncer l’intervention américaine au Vietnam, les conférences indochinoises constituent l’une des plus importantes tentatives de coalitions féministes de l’époque. L’événement incarne le projet de bâtir une sororité globale. Bien qu’abondamment critiqué dans l’historiographie, cet idéal est rarement analysé dans toute son ambiguïté : cet article propose donc d’historiciser la sororité et de mettre en lumière la complexité de ses usages politiques. Tout en reconnaissant l’importance des conflits entourant ce projet, nous souhaitons justement comprendre pourquoi, malgré tout, celui-ci s’impose comme cadre de référence partagé par une si grande diversité de militantes au tournant des années 1970.
Cette relecture des conférences indochinoises permet de proposer une définition plus souple de la sororité globale : les discours sur la question reflètent les tiraillements d’un mouvement mû par l’urgence d’articuler les différentes subjectivités des femmes pour organiser une opposition massive et efficace à la guerre du Vietnam. La sororité sert ainsi de cadre de référence fédérateur suffisamment malléable pour permettre à diverses conceptions du féminisme de coexister et de s’entrechoquer. Elle permet ainsi de baliser un terrain à partir duquel une solidarité féministe pluraliste et débattue peut se développer.
Publisher
Athabasca University Press