Affiliation:
1. Université Laurentienne, Sudbury
Abstract
Le postulat d’un acteur rationnel, autonome, conscient, intentionnel et intéressé a maintes fois été dénoncé, notamment par les approches relationnelles. Les critiques ont rappelé l’importance de l’inconscient et de l’émotion dans la psyché humaine, l’impossibilité de comprendre l’action humaine en dehors d’un rapport aux structures sociales, le caractère illégitime d’une subjectivité qui délibère de façon monadique. À elles seules, ces critiques auraient dû évacuer depuis longtemps l’axiomatique rationalisante. Pourtant, cette axiomatique ne perd rien de sa vigueur; elle continue à dominer les modélisations en sciences humaines. La question se pose de savoir comment elle fait pour s’éterniser. Il faut bien qu’elle justifie son existence.
Dans un travail récent, nous avons repéré sept manières par lesquelles les spécialistes des sciences humaines parviennent à légitimer cette axiomatique, qui est au mieux une demi-vérité (NPSS, 2015). Or, aucune de ces justifications ne représente réellement une réponse à la critique relationnelle. Et si l’on peut relever ces justifications et montrer qu’elles n’en sont pas réellement, c’est forcément qu’il y a quelque chose de sécurisant pour les spécialistes des sciences humaines à rester sourds à ces démonstrations.
Notre intention, dans ce texte, est de mettre en évidence cet aspect sécurisant des modélisations rationalisantes et ce qu’il y a de terrifiant dans les autres, qu’il s’agisse de celles qui n’ont pas d’acteur rationnel ou de celles qui ne se fondent pas sur l’acteur en lui-même. Nous montrons que les sciences humaines sont attachées à un anthropocentrisme qui nuit à leur aptitude à produire de l’abstraction, que cet anthropocentrisme est beaucoup plus un idéalisme que le résultat d’une analyse, ce qui accentue la difficulté à générer des abstractions opérationnalisables, et même à donner cours à un relationalisme empirique dans lequel les échanges ne seraient pas que les rapports entre les acteurs sociaux. Nous montrons en outre que l’anthropocentrisme agit comme obstacle au relationalisme dès lors que cette approche veut s’élever dans l’ordre de l’abstraction pour générer de la science de l’humain.
Reference26 articles.
1. Bagaoui, Rachid, « Un paradigme systémique relationnel est-il possible ? Proposition d’une typologie relationnelle », Nouvelles perspectives en sciences sociales, vol. 3, no 1, 2007, p. 151-175.
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5. Damasio, Antonio, L’erreur de Descartes : corps, émotions, conscience, Paris, Odile Jacob, 1995.
Cited by
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